La serpente ailée
Une ailée nommé Lilith...
Lilith est vraisemblablement l'écho de ce qui était considéré comme une fée malfaisante, telle la Lamashtu de la tradition persane, qui aurait été reprise par la tradition juive aux temps de Babylone. Déesse-serpent, déesse ailée, pour Marija Gimbutas elle correspond, plus que l’Ishtar-Ève à la Déesse mère dont on retrouve la trace depuis le paléolithique supérieur. On la retrouve également dans la « déesse-aux-serpents » de la civilisation minoenne, mais également sous les traits d'Isis, la déesse ailée de l'Égypte ancienne.
Au commencement, Lilith, n’est que l’appellation générique d'une classe de démons femelles : elle vient donc des Enfers, de la poussière.
il y a deux Lilith, la petite et la grande :
la grande est l'épouse de Samaël, c’est la femme de la dépravation. Les Geonim expliquent qu'elle contrôle 480 légions, autant que la valeur numérique de son nom. Pour avoir, malgré tout, sauvé quelques enfants (dont le fils du roi Nabuchodonosor), elle est autorisée à remonter sur Terre à l’approche du crépuscule.
la seconde est l'épouse d'Asmodée, prince des Enfers où là, Lilith, règne, en toute majesté, avec les trois autre reines des démons : Igrat, Mahalath et Nahemah et toutes leurs cohortes qui donnent naissance à des enfants par légions.
Quels que soient les commentateurs, Lilith est toujours décrite comme une maîtresse femme qui a un fort ascendant sur Adam et un appétit sexuel aussi considérable qu'insatiable.
Adam se serait séparé de Lilith pour plusieurs raisons, toutes d'ordre sexuel.
Lilith qui refusait de voir son corps déformé par les grossesses pratiquait la contraception voire peut-être l'avortement.
Adam soupçonnait Lilith, l'insatiable, de forniquer avec les incubes, contrevenant ainsi au Commandement "Tu n'auras d'autres époux que ton époux" ;
Adam, ne souhaitait pratiquer les relations sexuelles principalement ou uniquement en s’en tenant à la position dite du missionnaire. Mais, Lilith, elle, rejetait les postures les plus classiques et particulièrement celle dite position du missionnaire qui imposerait à la femme une position inférieure. Lilith, lasse de subir les reproches, les scènes et les exigences de son compagnon, se révolte.
Adam, faisant preuve d’autorité, sous le coup de la colère, il la chasse du Paradis terrestre sous le regard d'YHVH qui prévenu, envoie les trois anges de la Médecine pour essayer de la raisonner.
Mais elle refuse d’obtempérer aux demandes du Divin, ce qui est l’une de ses caractéristiques. Finalement, chassée, par l'homme, la première du Paradis, Lilith, éperdue, fuit droit devant elle, jusqu’aux abords de la mer Rouge. Là, elle cherche âme qui vive et ne trouve bien sûr que des animaux et des démons. Chassée de l’Humanité elle se jette dans la diablerie et commence (ou continue) à entretenir des relations avec le grand démon mais aussi avec nombre démons et démones succubes.
Finalement YHVH prend acte de l'irrémédiabilité de ses turpitudes et la rejette définitivement de la surface de la Terre vers l'abîme, au fond des océans, elle y demeure ensuite profitant des grottes sous-marines, pour rejoindre la Géhenne procréant au passage, une multitude de démons tant aquatiques qu'infra-terrestres. Elle devient ainsi la Femme des trois mondes, seul le monde céleste lui restant fermé.
Photo : © P.Pissier
Lilith fonctionne alternativement comme image du démon sexuel et comme femme fatale, stérile
là où Ève est davantage vue comme la femme aussi idéale que génitrice.
En tant que femme supplantée ou abandonnée, au bénéfice d'une autre femme, Lilith représente les haines anti-familiales, la haine des couples et des enfants.
Lilith et les enfants : dévorée elle-même par la jalousie, elle n'hésite guère à tuer les nouveaux-nés allant jusqu'à les dévorer, s'enivrant de leur sang. Si la garde des Mères est trop vigilante, Lilith déterre leurs cadavres, les vidant de leurs entrailles, ne laissant que quelques fétus de paille.
toujours selon la Tradition juive, Lilith, punie par la stérilité, pousse Lucifer, déguisé en serpent, à pervertir Eve en la possédant charnellement. De cette union contre-nature, naît le premier homme ombiliqué, en fait un être monstrueux : Caïn qui commet le premier meurtre sur Terre, en tuant Abel, son propre frère. Ainsi, Lilith, est quadruplement et terriblement vengée : à travers l’homme trahi (Adam), à travers la mère bafouée et trompée, à travers l’enfant perverti devenu assassin (Caïn) et quatrièmement par l’enfant tué. Bien au-delà de la vengeance, Lilith peut jouir du mal pour le mal en tant que pratiquante du satanisme.
©Megaera Callisto Lorenz
Thèmes archaïques
fantasmes, le « dévorement » (ou dévoration) des enfants et de leurs dépouilles,
la séduction forcée ‘quasi abductive’ des jeunes hommes,
la pensée magique, la fusion réel/ irréel
Thèmes limites
Le Bien et le Mal
Inconscient collectif (Imaginaire collectif ?)
Humanité et Animalité : la femme et le serpent
Thèmes archétypaux
Dieu et Diable, Enfer et Paradis ;
l’Homme et la Femme, le nouveau-né ;
la sexualité : le choix d’objet, la rivalité, l’accomplissement : l’Homme, la Femme et l’Enfant
la relation homme / femme
attraction / répulsion, séduction, pulsions, rapports sexuels, grossesse, fécondité / stérilité, rivalité homme / femme
la relation femme/ femme
grossesse, fécondité/ stérilité, la rivalité femme / femme, le miroir.
Thèmes proches : réel / irréel.
La rivalité femme / femme
Prélude la rivalité du miroir.
Avec la naissance d’Ève, Lilith, jusque-là femme unique, se découvre une rivale triomphante, adulte comme elle (puisqu’apparemment, toutes deux ont été créées adultes). Par une jalousie quasi morbide, Lilith causera la perversion / perte de cette rivale par l’intermédiaire du Serpent (le démon, la Gnose / la Connaissance) comme, déjà, elle-même l’avait été par ce dernier.
Finalement, à travers cet épisode, les deux femmes, assez dissemblables au départ, finissent par se ressembler en miroir.
Photo : © Hellrasoir